[Récit] Coupable

[Note de l'auteur]
J'offre ce texte à Uzlag. Je préfère ça que de répondre sur son post de départ. Puisse le Soleil éclairer ta route et Sa Lumière te donner sa sagesse vieille brique. J'espère que ce n'est qu'un au revoir.
[/Note de l'auteur]

Les marteaux fendaient l'air et indifféremment la chair de démon comme de mort-vivant. Les trois Vindicateurs portaient la Lumière purificatrice sans broncher, avec précision et ténacité. Uzlag n'avait à priori aucun pouvoir de paladin, mais son marteau brillait semblable à celui des autres. A force, nous étions tellement lié, si proche lui et moi que je parvenais à l'investir de ma propre puissance. La scène devait avoir quelque chose d'irréel avec cet Orc qui s'illuminait à l'instar un membre de la Main d'Argent. Nous opérions sur un rempart du puits. La Malebrêche devait s'étendre en contre-bas et les deux forces du mal s'y battaient comme les auras que je percevais me l'indiquaient. Les bruits d'explosions de bombes à arcannes, larguées par les talentueux pilotes qui nous avaient déjà ouvert la voie parachevaient la sensation de chaos en cet endroit.

Le dernier de nos adversaires s'écroula dans un bruit sourd. Je soufflais un peu. Maintenir à la fois mon pouvoir en Uzlag et tout le monde en état de combattre par des soins et boucliers me demandait une concentration extrêmement forte. Sans ma cécité qui paraissait souvent pour un handicap, je n'y arriverais sûrement pas. Le guerrier me serra dans ses bras avec une douceur que peu lui connaissaient, comme si j'étais faite de cristal extrêmement fragile. Et pourtant de mon côté, je ressentais surtout la protection qu'il m'apportait, à la manière de lourds remparts qui me permettaient un isolement de quelques instants pour récupérer mes forces. Je puisais presque de sa vitalité dans un échange subtil, reprenant indirectement ce que je lui avais donné pour le combat.

Les deux Draeneïs, qui nous accompagnaient, devaient observer la scène intrigué, mais ils ne se permirent aucun commentaire. Ils auraient pu juger que nous menions une relation amoureuse, ce n'était nullement le cas. Ce geste que nous avions déjà répété lors d'autres combats ne faisait que symboliser l'union qui pouvait existait entre un Anachorète et un Vindicateur. Au nom de la Lumière, nous ne formions pratiquement plus qu'un dans notre combat face aux serviteurs du Néant, au mal absolu. Lorsque j'en avais parlé à Ishanah, elle m'avait répondu que nous n'étions pas les premiers à qui cela arrivait au sein de l'Aldor. Nous présentions cependant un cas exceptionnel, car Uzlag n'entretenait pas le même lien qu'un paladin auprès de la Lumière. La Grande Prêtresse me mit aussi en garde. La perte de l'un des deux pourrait entraîner des conséquences désastreuses sur l'autre.

Je me détachais de l'Orc et le groupe tergiversa quelques instants. Nous avions accompli notre mission dans ce dernier combat et pouvions rentrer la tête haute. Cependant, je ressentais la présence d'un démon proche. Relativement puissant, sans doute un Doomguard supérieur, mais rien qui puisse s'opposer à notre force de frappe. Un Vindicateur émit quelques oppositions, me jugeant trop fatiguée. Je balayais son argumentation d'un revers de la main. Je me sentais en forme et notre travail devait être accompli. Ce suppôt du Néant ne nous poserait aucun problème.

Je m'étais lourdement trompée. Nous avions certes la capacité d'en venir à bout, mais il se révéla extrêmement coriace. Il pouvait presque balayer mes trois compagnons d'un geste de ses bras immense. Il paraissait doté d'un pouvoir de régénération, certaines de ses plaies se refermant malgré les armes bénies par la Lumière. Le combat tournait à notre avantage quand il fracassa le sol, d'un coup de jambe, nous éjectant et nous éparpillant sous l'onde de choc. Je relevais la tête, légèrement désorientée. Je percevais Uzlag rayonnant de la Lumière que j'avais infusée en lui. Je ne compris pas tout de suite, il s'était relevé et attendait en position, comme s'il cherchait à s'ancrer dans le sol, le marteau prêt à frapper. Je pivotais légèrement la tête et perçu le mouvement de l'imposant démon. Fou de rage des blessures que nous avions pu lui infliger, il chargeait mon Vindicateur.

La scène dura certainement qu'une poignée de seconde. Pour moi, elle parut s'allonger dans un ralenti absurde. D'un geste dont seul un guerrier de son niveau connait le secret, l'Orc percuta la tête du Doomguard de son marteau, l'écrasant avec violence. Il espérait sans doute avoir la force suffisante pour contenir le choc du démon lancé à pleine vitesse sur lui. Il ne l'eut pas. Abasourdie, je les vis tous deux sans doute voler, quittant le rempart surlequel nous étions et amorçant une grande chutte. Ma gorge se serra et je criais son nom à plein poumon, d'une voix certainement suraiguë. J'allais m'élancer à leur suite, me jeter s'il fallait pour le sauver. Un des Draeneï me retint avec peine, m'expliquant ce que je ne voyais pas forcément. Uzlag et son adversaire, qu'il avait surement tué de son marteau, venaient de tomber du côté des remparts tenus par Brutallus et ses sbires. Sans aucun doute dans le mur de flammes dressé par la Légion pour contenir le Fléau. Nous ne pouvions plus rien pour lui, si ce n'est mourir pour rejoindre son âme.

Mourir, je crois que c'est exactement ce qui me traversa l'esprit quelques instants. Mon coeur sembla se fendre alors que dans ma tête, d'autres images se formaient, d'autres souvenirs, ceux de Baelnar, mon Vindicateur précédent. Comme pour me rappeler qu'une fois de plus, j'avais échoué, que mon orgueil n'était pas à la hauteur de notre combat. Quelque chose en moi, ou peut être la voix du Draeneï, tentait de me convaincre que ce n'était pas ma faute. Rien n'y faisait, le sentiment atroce de la culpabilité m'éprenait et mes larmes n'eurent aucun barrage. Nous n'aurions jamais dû nous en prendre à ce démon. Je venais de tuer Uzlag Thunderfist.

Magnifique récit ... Je ressens une grande peine pour cette pauvre Dame Zaphira ... Par contre, j'espère que tu ne comptes pas monter ton raid contre Brutallus pour Uzlag, sinon on est mal >.>

Aussi, une petite bizarrerie :

Abasourdie, je les vis tous deux sans doute voler

... c'est quelle genre de cécité ?

Raison du "sans doute". Zaphira voit clairement dans sa cécité: tout ce qui est constitué de felarcanne ou à partir de felarcanne (démon et mort-vivant), ce qui est constitué de vide ou à partir de vide (marcheur du Vide, les elfes du scénar Raz-de-Néant) et ce qui est constitué de ou à partir de Lumière/Ombre (Uzlag était infusé de sa propre lumière).

Donc elle a en quelque sorte vu le mouvement des deux entremêlé, mais sans le décor Elle déduit donc qu'elle les a vu tomber

Il est troop touchant ce texte

Ce texte est simplement sublime

*gorge nouée*

Superbe récit, les émotions sont très bien décrites

bel hommage à l'orc vindicateur