[Récit - Background] Les deux dernières Calaheraë

Voici un sujet dans lequel je pense poster à l'occasion des petites histoires de Sérindë mais aussi son background ! En esperant que cela vous plaise... voici le premier récit !


Adepte Calaheraë ?

Blam ! Sérindë venait de poser un gros sac sur le bureau de son supérieur, cela avec un manque cruel de finesse et de bonne volonté. L'officier demeura silencieux un moment, observant ce don d'un oeil interrogateur avant de lever ses yeux verts.

- Vous avez quelque chose à m'expliquer Sérindë Calaheraë ? supputa-t-il.

- Voici les nombreux objets que vous m'avez envoyée chercher Messire. Vous pouvez vérifier, il n'y manque rien... et j'en ai profité pour mettre un peu d'ordre sur place, résuma la jeune femme d'un ton assez froid.

Sans répondre, le chevalier tria le contenu du sac. Tout y était. Lorsqu'il arriva au sang démoniaque...

- Vous saviez pour le démon ? Qu'il serait là ? demanda sèchement Sérindë.

L'Elfe releva le regard, il sembla surpris. Puis il se durcit pour s'exprimer d'une voix d'un calme inquiétant.

- Dois-je en déduire que vous avez vous-même vaincu le démon dont vous m'amenez le sang ?

- Oui, affirma-t-elle toujours glaciale.

- Dans ce cas, je vous en félicite. Néanmoins, damoiselle Calaheraë, je dois me tromper mais je vous sens hostile aujourd'hui. Je fais très certainement erreur mais il me semble que vous seriez entrain de vous aventurer sur le chemin glissant. Mais si vous avez quoi que ce soit à me reprocher d'une telle gravité, pourquoi n'irions-nous pas solliciter l'avis de la cours martiale ?

- Je m'inquiétais juste d'étranges coïncidences... Peut-être y a-t-il eu des fuites... tenta de se rattraper Sérindë.

Le chevalier frappa du poing sur la table, faisant sursauter la jeune femme, mais demeurait d'un calme olympien.

- Allons donc chevalier, ne m'insultez pas avec ce piètre retournement. Je sais parfaitement ce que vous croyez. Tout le monde le sait ici.

Le teint de la Paladine tourna au rouge.
- Et l'insigne ?
- La voici... Je l'ai trouvée à Mortholme.
- Ne me la donnez pas, elle est la votre maintenant...
Sérindë fut surprise de voir son supérieur se radoucir ainsi. Son regard était presque devenu... bienveillant. Comme pour répondre à l'incompréhension de la demoiselle, il reprit.

- Vous avez accompli des missions difficiles et cela avec beaucoup de zèle. Vous avez ramené tout ce que je vous avais demandé mais vous avez aussi accompli votre devoir de Chevalier et ne vous contentant pas de cela, vous avez défait des créatures dangereuses et des individus malfaisants... tout cela sans jamais avoir rendu visite au Naaru. Ce sera pour moi un honneur d'avoir sous mes ordres la seconde et dernière héritière des Calaheraë. A l'image de vos parents en leur temps et de votre soeur, il ne fait pas de doute qu'un grand avenir vous attend. Celui qui est mort et dont vous porterez l'insigne serait fier de savoir qu'elle vous revient aujourd'hui... La question qui m'inquiète... C'est est-ce que vous serez fière de porter la sienne, adepte Calaheraë...?

La jeune femme se sentit soudainement en équilibre très instable sur ses jambes. Elle se retrouvait face à la dernière démonstration qu'elle attendait recevoir ici.

- Vous croyez-vous meilleure que nous Sérindë Calaheraë ? questionna l'homme d'une voix étonnamment douce.

- Je... eh bien je... Je n'ai pas eu besoin d'aller voir le Naaru comme vous l'avez dit...

- Et cela fait de vous quelqu'un de meilleur que vos frères et soeurs chevaliers ?

- Je sers la Lumière...

- Adepte Calaheraë, vous voulez rester fidèle à l'image de votre famille, c'est tout à votre honneur mais vous devez bien comprendre que la Lumière n'a plus le même sens maintenant que dans les temps anciens. Ce sont les idéaux que la Lumière prétendait nous enseigner que nous servons.

- Prétendait nous enseigner ?

- Sérindë, vous êtes aussi bien placée que moi pour vous en souvenir. Où était la Lumière lorsque Quel'thalas est tombée ? Où était la Lumière quand Arthas nous a exterminé ? Où était la Lumière quand votre famille est tombée, quand votre mentor s'est sacrifiée ?

- Vous la connaissiez...? balbutia la paladine.

- Eldalòte était ma cousine. Vous savez bien comme elle était fidèle et dévouée. Ne méritait-elle pas mieux ?

- Nous n'étions juste pas assez forts... hasarda Sérindë.

Le Chevalier soupira, il n'était toujours pas agressif.

- Pourquoi croyez-vous que je me donne tout ce mal Sérindë ? Votre famille était respectée, Eldalòte croyait en vous et je crois aussi que vous pouvez devenir un grand chevalier... mais vous devez arrêter avec vos bêtises. Qu'imaginez-vous ? J'étais Paladin, beaucoup d'entres nous étions Paladins et dévoués. Nous avons été trahis, par la Lumière, puis par nos alliés et amis. Aujourd'hui, nous ramenons la Lumière par la force s'il le faut, elle doit honorer la dévotion que nous lui avons offerte.

Sérindë se mordit la lèvre, que pouvait-elle bien répondre à tout cela ? Quelque part elle comprenait l'amertume de ces chevaliers de sang, elle avait ressentit la même chose.

- Vos frères et vos soeurs chevaliers se battent en ce moment même. Ils se battent pour sauver notre peuple, pour lui rendre sa grandeur, protéger Lunargent et tout ce qui nous est cher. Celui dont vous portez l'insigne est mort pour cela. Bien d'autres meurent pour cela. Peut-être n'ont-ils pas la chance d'hériter d'une famille qui semble garder la faveur de la Lumière, ou je ne sais quoi, mais ils sont courageux et dévoués envers leur peuple.

Le Chevalier se leva et fit quelque pas pour se retrouver au niveau de Sérindë, il la regardait droit dans les yeux... d'un regard qui n'était ni accusateur, ni menaçant...

- Alors, maintenant que vous avez bien compris le sens profond de ma question, je vous la pose à nouveau... Vous croyez-vous meilleure que nous, adepte Sérindë Calaheraë ?


A suivre...

Adepte Calaheraë ? (Suite et fin)

La jeune Paladine déglutit, elle soutint difficilement le regard du Chevalier mais ne baissa jamais les yeux. Il lui fallut un assez long instant pour se décider à répondre.

- Je le crois... affirma-t-elle avec moins d'assurance qu'elle ne l'aurait voulu.

L'homme demeura silencieux comme pour prendre le temps d'assimiler la réponse et éclata de rire. Il fit quelques pas et se laissa tomber dans son siège.

- Vous êtes impossible adepte. Plus d'un vous aurait faite radier de notre ordre... et peut-être même exécutée pour ces propos.

- Mais pas vous. Vous vouliez une réponse sincère et vous n'êtes pas de ceux qui posent des questions sans être prêts à affronter les réponses.

L'Elfe leva des yeux amusés vers Sérindë, il y avait presque quelque chose d'affectueux. Il lui fit signe de poursuivre, ce qu'elle ne sembla pas comprendre vu qu'elle haussa un sourcil interrogateur.

- Allons, vous n'êtes pas de celles qui répondent sans pouvoir étayer leurs allégations ?

- Eh bien... Pour commencer, comme vous l'avez dit, mes pouvoirs ne me viennent pas du Naaru. Ce qui fait de moi une vraie Paladine.

- Vous l'aviez déjà largement sous-entendu. Pourquoi valorisez-vous plus la position de Paladin ? Nous avons les mêmes pouvoirs et oeuvrons pour la même quête.

- Tout le monde peut-être Chevalier de Sang... répondit-elle d'un petit ton hautain.

Comme elle voyait son supérieur froncer les sourcils, elle ajouta rapidement:

- Et puis je n'ai pas besoin d'asservir une créature...
- Développez votre idée adepte, ordonna un peu plus sèchement l'homme.
- Je pense que nous aurions pu faire autrement que de réduire à l'escl...
- Oubliez donc ce Naaru. Il était tellement évident que vous l'ajoutiez pour vous donner bonne conscience... Je vous demande de développer votre premier argument.

- Tout le monde peut-être Chevalier de Sang. C'est un pouvoir bradé et distribué. Ils forment la majorité de notre garde, de notre armée. L'ordre compte dans ses rangs des fils de paysans, de bourgeois, du petit peuple. Il n'y a rien de... particulier... à être Chevalier de Sang.

- Sérindë Calaheraë, vous rendez-vous seulement compte de ce que vous êtes entrain de dire ?
Le ton du chevalier était devenu terriblement cassant. Sérindë sentit la panique monter en elle et tenta de se justifier.
- M... mais vous étiez paladin, et noble, vous devez bien comprendre ce que je veux dire...

- Je comprends et aurais préféré ne rien comprendre ! Je suis choqué que vous, qui avez été l'écuyère d'Eldalòte, puissiez défendre des idées aussi abjectes ! Le paladinat n'était pas une question de sang ou d'héritage noble ! s'emporta soudainement le chevalier. Ses valeurs étaient le courage, le mérite, la dévotion et la générosité ! Pas le lignage !

La paladine eut un mouvement de recule, surprise par ce soudain accès de violence. Elle semblait désemparée. Ceci fit baisser d'un ton son supérieur, mais sa voix demeurait froide, glaciale même.

- Vous ne semblez pas comprendre...
- Les... les choses sont juste ainsi...
- Ce n'est pas Eldalòte qui vous a enseignée cela... Et j'ai peine à croire que les nobles Calaheraë puissent en être responsables alors je mettrais cela sur le compte des horreurs que vous avez vécues. Mais si la Lumière offre bel et bien ses faveurs à une personne telle que vous, alors nous faisons bien de ne plus nous fier à elle.

Sérindë cru recevoir une claque en pleine face, au point qu'elle chancela sans même s'en apercevoir. Elle demeura silencieuse, muette même, le visage déconfit, une boule au fond des entrailles. Elle se mordit la langue jusqu'au sang comme pour se punir d'avoir envie de pleurer comme une petite fille qui avait été durement grondée.

- Amenez cela à Bemarrin, il forgera votre corseque, adepte Calaheraë, lacha le chevalier en poussant le sac vers la jeune femme. Je vous donne une chance, par respect pour votre famille et la mémoire de ma cousine.

Toute honteuse, Sérindë approcha et attrapa le sac un peu comme une voleuse. Puis elle se recula vers le sortie sans oser regarder le chevalier, de toute manière, il ne semblait plus s'intéresser à elle.

- Adepte Calaheraë ?
La Paladine s'arrêta mais n'eut pas le courage de se retourner même si le ton était plus doux.
- L'ambition, vouloir être meilleure, particulière, ce n'est pas cela que je vous reproche, vous le comprenez bien ? Vous êtes encore jeune, très jeune. Vous pouvez encore trouver la force de renoncer à ces convictions odieuses. Si vous n'apprenez pas à respecter ceux qui n'ont pas vos prestigieuses ascendances, vous ne pourrez respecter votre propre peuple et vous ne pourrez respecter ses amis et ses alliés. Alors que deviendrez-vous, Sérindë Calaheraë ?

Le chevalier n'attendait bien entendu pas de réponse, la jeune femme sortit les épaules basses. En dehors de la pièce, elle serra le sac contre elle tandis qu'une énorme larme lui échappait de l'oeil. Elle l'essuya aussitôt, dépassée par ce qui venait d'arriver. Un Chevalier de Sang venait de lui apprendre ce qui était bien, qu'elle avait des idées révoltantes. Elle était totalement perdue. Ses amis prenaient souvent l'ordre des chevaliers comme exemple de ce qui était mauvais mais... l'un d'entres eux venait de lui tenir un discours encore plus virulent que beaucoup des choses qu'elle avait entendu chez les Fils.

- C'est tellement plus simple dans les légendes, murmura-t-elle pour elle-même.
Il souffla profondément et ravala toute larme. Elle devait repenser à tout cela, une fois qu'elle aurait la tête reposée. Personne ne devait rien savoir de cette discussion... personne...

A l'extérieur, Synwyn l'attendait. Elle avait été à ses côtés durant toute cette quête. Sérindë devait sa réussite à l'aide d'Eihlana, Zaphira et Serethil mais c'était surtout Synwyn qui avait été là du début à la fin pour l'aider et la soutenir.

- Alors ? demanda la prêtresse, légèrement inquiète.
- Alors pas grand chose... Ca s'est bien passé en fait... Il m'a félicitée pour avoir accompli cette mission... Je dois aller faire forger ma corseque.

Sérindë retrouva le sourire, elle ne dit rien de l'incident qu'il y avait eu pendant l'entretien. Sans doute détourna-t-elle même légèrement la vérité, elle se sentait trop honteuse pour la révéler. Et puis Synwyn était bien consciente qu'il faudrait du temps à la paladine pour se libérer de ses préjugés, avait-elle besoin qu'on lui rappelle cela ?