rêves...

Kaelthiras se réveilla en sursaut dans les draps de soie violets. Il était à bout de souffle, trempé, la sueur perlant sur son visage aux joues rougies. Instinctivement, il porta la main à son cou, la représentation du phénix flamboyant sur son cou semblait brûler réellement, comme si un fer rouge lui était appliqué sur la peau. Kittendria dormait paisiblement à côté de lui, accrochée à son sommeil sans rêve, respirant calmement. Il la regarda un moment attendri, caressa sa joue doucement du revers de sa main. Puis une nouvelle vague de douleur jailli du tatouage. Il serra les dents,refusant de réveiller sa fiancée par un quelconque bruit et se leva doucement du lit. Il descendit lentement et apperçu l'elfe Petrine et le troll Tän qui dormaient eux aussi. Sans bruit, il attrapa sa chemise, l'enfila rapidement sans la nouer complètement et sortit discrètement de la maison.
Il se dirigea instinctivement vers la petite fontaine près de chez eux. Il avança en titubant et s'appuya les mains crispées sur le rebord. Il contempla un moment son reflet puis il eu la brève impression de ne plus se voir lui. Lentement, de part son imagination, ses traits sur la surface de l'eau le firent lentement penser à son frère. Dans ses souvenirs, ils se ressemblaient comme deux gouttes d'eau, différents seulement par leur coiffure mais c'était un détail: leur visages étaient bien semblables en tout point. Pendant ce court instant, il en oublia la douleur cuisante qui lui taraudait le cou. C'était la première fois que ce genre de rêves se produisaient. Comme une mise en garde, un essai pour l'effrayer... Ou pour lui empêcher d'oublier. Impossible de toute manière. Il regarda ce reflet qui lui rappelait sa lâcheté et ses erreurs en se mordant la lèvre jusqu'au sang. Au moment où sa vue se brouilla légèrement il donna un violent coup dans l'eau, dispersant ces bouts de reflets aux quatre coins du bassin. Il renifla puis entreprit de s'humidifier le visage et de mouiller son cou. Le contact frais de l'eau sur le tatouage atténua petit à petit la douleur. Il resta accroché au rebord de la fontaine un long moment puis rentra chez Kittendria, se forcant à tirer un trait sur ce mauvais rêve...

*********************************************************

Un Employé arriva en courrant, tabassant furieusement la porte de l'habitation et finit par l'ouvrir, arrachant le loquet de son emplacement dans le bois. Ses yeux étaient exhorbités par la terreur, son corps tout entier tremblait sans qu'il arrive à se contrôler. Le père sursauta brutalement, ainsi que la mère. Le fermier leur aboya des cris d'avertissement strident, certains mots s'étouffant dans sa gorge sans s'énnoncer clairement.
"Là bas... Près des champs... Une-Une armée... Une armée de morts-vivants!!!"
Les propriétaires restèrent une infime partie de seconde sous le choc, se sachant comment réagir de suite. Finalement le père se précipita vers une épaisse veste en cuir matelassé, qui appartenait en fait à son fils aîné. Il l'enfila rapidement, certaines coutures gémissant sous son imposante carrure mais il se saisit d'une longue épée qui trônait à côté sans s'en soucier. Il s'avança jusqu'à l'entrée et la porte qui pendait lamentablement sur ses gonds. Il observa l'extérieur de la ferme et se figea, l'épée à la main. Il se retourna, les traits du visages tirés vers les occupants de la maison.
"Ma chérie, on part d'ici! Nous allons vers Lune d'argent! Non! ne prend rien nous n'avons pas le temps : on s'inquiétera une fois là bas!"
Sa femme s'écarta des affaires qu'elle avait de suite commencé à rassembler. Elle aquiesca et prit juste un petit sac rebondi caché dans un meuble puis se figea à son tour, la main devant les lèvres.
"Aestarion et Avä ! Ils sont encore à la grange!"
"Kael! Cours les prévenir et partez tous les trois immédiatement pour la capitale!"
Le jeune elfe hocha la tête en tremblant et s'empara d'une vieux mousquet avant de sortir par la porte de derrière. Ce qu'il vit enfin le terrifia. La marée de morts avançait telle une immense colonie d'insectes, sans se soucier de ce qui se trouvait sur leur chemin, gagnant du terrain inexhorablement. Déjà, à quelques centaines de mètres, il pouvait apercevoir grâce à sa vue plus développée les premiers cadavres des forestiers elfiques. Ceux ci avaient été envoyé soit pour contrôler cette menace, pour la diminuer peut-être mais s'ils avaient été envoyés avec pour mission de combattre cet ennemis, ils avaient couru au suicide. Leur corps démembrés se faisaient déjà piétiner ou dévorer par les soldats pourrissants.

Kael se plaqua brutalement la main devant la bouche puis se rappela ce que son père lui avait dit. Il se détourna du spectacle et couru à toutes jambes vers la grange, se demandant si, en espérant qu'ils arriveraient à rejoindre la ville, ils seraient bel et bien en sécurité dans ses murs.
Il arriva finalement près d'un large bâtiment de plafond bas, du foin débordant des fenêtres et ouvertures. Le-dit bâtiment se trouvait encerclé par un contingant de goules moisies et frénétiques. N'osant imaginer le pire, il se précipita vers l'entrée de la grange et s'y engouffra pendant que les goules franchissaient les derniers champs qui les séparaient de lui. A l'intérieur de la grange, sa soeur pleurait, recroquevillée sur elle-même dans un coin de paille. Son frère aîné, bien bâti et entrainé un minimum tenait fermement une fourche à deux dents dans ses mains. Les dents de la fourche étaient plantées dans le crâne d'une goule qui finissait de s'agiter, rejoignant deux autres cadavres dans leur immobilité.
Kael pousse un soupir de soulagement en voyant les deux sains et sauf. Il ne perdit pas une seconde et leur expliqua sans tarder les consignes de son père. Son frère hocha la tête et s'approcha de l'entrée de la grange pendant que lui-même se chargeait de faire avancer sa soeur. Il firent quelques pas quand le frère aîné revint en courant.
"Ils sont à l'entrée! Toi et Avä vous devez prendre le passage de rechange et courir vers Lune! Je me charge de les retenir le temps que vous partiez et ensuite je vous rejoint dès que possible!"
Son frère semblait avoir confiance en ses capacités. Il était peu être un peu trop sûr de lui mais après tout il avait passé un bon mois à s'entraîner avec les gardes de Lune d'argent au maniement des armes. La petite elfe blonde protesta vivement, refusant d'abandonner son frère ici. Pour elle, il était inconcevable de le laisser.
Refusant de se l'avouer, c'est la peur qui faisait accepter à Kael les ordres de son frère... En cet instant seule la terreur dominait des sentiments, ce qu'il voulait s'était fuir loin de ce massacre, se mettre en sûreté pour que sa famille se rassemble à nouveau après les combats. Alors que l'aîné tentait de convaincre sa soeur, Kael s'affairait déjà à dégager la paille dissimulant une porte de cave. Ce passage débouchait à une cinquantaine de mètre du bâtiment en lui même et servait surtout de cave à vin de secour.
Finalement, il dû forcer sa soeur à le suivre malgré elle. Pendant qu'il l'entrainait avec elle dans le souterrain, elle agitait vaguement ses bras vers Aestarion en pleurant à chaudes larmes. Celui-ci leur adressa un dernier sourire réconfortant puis se retourna armé de sa seule fourche et fonca vers la porte, disparaissant de sa vue.
Kaelthiras et sa soeur parcoururent rapidement le tunnel encombré de tonneaux, renversant ses bouteilles au fil de leur fuite. Il tenait fermement sa soeur pour l'empêcher de retourner en arrière. Celle-ci hurlait tour à tour le nom de leur frère à tous les deux, invectivant Kael à chaque mètre franchis. Elle le traita de tous les noms possibles, se débattait furieusement dans ses bras mais il finirent par atteindre la sortie. Il ouvrit les portes battantes d'un violent coup d'épaule et les amena à l'air libre. La longue colonie de mort-vivants semblait s'être un peu éloignée mais ils pouvaient voir des goules entrer par groupes entiers dans la grange où se trouvait leur frère.
Sans leur laisser de répit, Kael les fit franchir rapidement les distances jusqu'au bois des chants éternels. Là seulement, épuisés aussi bien physiquement que mentalement, il se décida à faire une pause. Il lacha pour la première fois sa soeur et s'affaira à préparer un petit feu pour passer le reste de la nuit là. Il aurait du se méfier lorsque sa soeur arrêta enfin de l'injurier mais il ne réagit pas et il fut trop tard lorsque sa soeur abattit une pierre sur l'arrière de son crâne. Un violente lumière blanche sembla lui brûler les yeux , vite suivie du noir complet alors qu'il s'évanouissait...